
« Les possédés d’Illfurth » de Yann Verburgh en collaboration avec Lionel Lingelser – Mise en scène et interprétation : Lionel Lingelser – Jusqu’au 5 janvier 2023 au MAC de Bischwiller – Durée : 1h15
Alors que cette histoire ne pourrait être que celle de jeunes alsaciens du XIXème siècle en proie aux démons et dont seul l’exorcisme pourrait permettre de sortir de ce cauchemar, le comédien et metteur en scène, sous la plume de Yann Verburgh, offre en fait une folle épopée, celle du parcours initiatique de ce jeune Hélios, double du comédien Lionel Lingelser, qui va découvrir sa liberté et son total épanouissement grâce au théâtre. Lionel Lingelser s’est ainsi replongé au cœur de son enfance, faite de toutes ses blessures réelles ou imagées et fait voler en éclat son enfance pour nous faire mieux découvrir d’où il puise cette force et cet incommensurable envie d’espace et de scène.
Sans quasiment aucun accessoire si ce n’est un indéniable talent, Lionel Lingelser survole la scène. Que ce soit dans des scènes franchement drôles avec une mère possessive et aimante ou sur le dos d’un dragon tout droit sorti des enfers, il excelle dans tous les domaines. Chacun devient alors avec lui ce petit garçon fragile qui n’attend que le bon moment pour déplier ses ailes et prendre son envol. Nul doute que le spectacle pourrait durer trois heures tant l’écriture est dense, foisonnante et folle, mais Lionel Lingelser et Yann Verburgh ont su intelligemment couper et ne garder que ce qui semble maintenant essentiel.
Tout le public semble avec lui au cœur de son épopée, il entraîne et fascine, trouble. Parfois sombre et la seconde d’après virevoltant, son rythme donne le la à un public au diapason. Un grand moment durant lequel on se sent à la fois seul face au comédien et terriblement ensemble avec tout le public plongé dans une aventure commune à laquelle on est fier de prendre part. Un spectacle à n’absolument pas louper pour un texte sensible et beau, une mise en scène qui ne l’est pas moins et un formidable comédien, grand passeur d’émotions.
Pierre Salles
Photo Jean-Louis Fernandez