« LE CHOEUR DES AMANTS », UNE BELLE OEUVRE POETIQUE

choeur-amants-c-filipe-ferreira-3525

Le choeur des Amants – Tiago Rodrigues – Théâtre des Bouffes du Nord, Paris, du 8 au 30 octobre 2022 puis en tournée.

Après « Dans la mesure de l’impossible » et « Catarina et la beauté des fascistes », voilà le troisième opus de Tiago Rodrigues qu’il nous est donné de voir cette année. Les reports du Covid y sont pour beaucoup. Troisième spectacle, troisième univers, si différent des deux autres qu’il permet de mesurer toute l’étendue du talent du dramaturge portugais. La pièce est une re-création d’une œuvre de jeunesse. Court, léger, beau et poétique, Le chœur des amants nous embarque dans un récit de vie haletant et émouvant. Les deux acteurs – Grégoire Monsaingeon et Alma Palacios ce jour là – racontent leur histoire à l’unisson, engagés et engageants. Une histoire infiniment poétique et positive qui clame l’urgence de vivre.

La scène est vide, le couple se tient face au public qu’il regarde droit dans les yeux. Le chœur des amants est un chœur à part entière, deux personnes qui parlent à l’unisson. La femme raconte son histoire, l’homme utilise les mêmes mots pour décliner son histoire à elle. Les deux voix simultanées sont troublantes. Elles disent l’unité du couple en même temps qu’elles aiguisent l’attention du public. La pièce démarre sur une tension croissante, une crise d’asthme qui met la vie de la jeune femme en danger. En dire plus gâcherait le suspense…

Comment vivre après avoir vu la mort en face ? Que changer et comment ? A-t-on le temps de vivre et qu’en fait-on ? Qu’est-ce qui est important ? L’histoire fait même un détour par le confinement pour entretenir le questionnement. Le flot du récit des deux protagonistes s’ancre dans les détails du quotidien, les petites habitudes, le pull bleu-verdâtre, l’agrafeuse, le rêve d’un safari, d’un jardin… L’humour est là, distillé par petites touches, derrière sa dyslexie à elle, derrière leur incapacité à voir la fin du film Scarface, ou dans leur manière de le raconter. Quand elle parle de « faire du théâtre » on devine que Tiago Rodrigues a pioché dans sa propre vie pour raconter celle de ce couple.

Paradoxalement, la multiplicité des détails de la vie quotidienne qui pourraient paraître triviaux rend l’œuvre encore plus poétique. Ces mots dits à l’unisson traduisent la force du couple. Le détour par un poème et une chanson d’amour (O mon amour, mon doux mon tendre…) est magnifique. La nature reprend ses droits à la fin pour boucler le cycle de la vie.

Il y a une énergie folle dans ce récit raconté à toute allure. La relative banalité de ces vies est magnifiée par l’intérêt qu’on leur porte et par l’attachement de ce couple au point d’en faire une œuvre poétique, belle et positive, avec une urgence de vivre communicative.

Emmanuelle Picard

Photo Filipe Ferreira

Publicité

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s