Qui va là ? – de et avec Thierry de Pina – Cie Ah le Zèbre – Aux Déchargeurs à Paris : les mardis et mercredis à 21h du 3 au 25 mai 2022.
Sur scène un fauteuil. Dans la salle parmi les spectateurs quelqu’un, un homme, demande l’heure et s’étonne du retard et de l’absence du comédien. Progressivement tout s’anime. Le décor se construit. Des objets sont rajoutés: un carton, un escabeau, une cuvette, et bien sûr le fauteuil de maman… Ils ont une très grande importance dans l’architecture du récit de l’homme qui maintenant est à la place du comédien ? Qui est-il ?
Il nous informe qu’il se nomme Alexandre Cabari, SDF depuis la mort de sa mère. Son père est décédé bien avant. Le pécule dispersé, il erre de ville en ville, il est libre. Pendant plus d’une heure, Alexandre raconte sa vie, son cheminement, ses errances, ses désillusions, la vie qu’il mène. Tout n’est pas triste. C’est drôle. Émouvant. Tendre. Alexandre excelle dans la narration de ce parcours de vie.
Mais qu’a-t-il dans ce sac qui ne le quitte jamais et dont il garde jalousement le contenu ? Plus que des mots ; une scène de nu s’immisce dans la narration et, à elle seule signifie le manque, le désarroi ; ce qui met à bas la dignité, l’absolue indignité perçue, mais quoi ! Peut-on ignorer la réalité quotidienne !
Alexandre ( Thierry de Pina ) fait preuve de beaucoup de sensibilité, il met du temps entre l’émotion et l’action ; une manière d’être en même temps qu’une manière de penser. Les moments de fragilité laissent la place à l’incertitude. Alexandre apparaît alors en perte de repères ; l’anomie est sous-jacente. Progressivement le personnage s’approprie le comédien et vice versa. Belle prestation. Il était épidémiologiste avant la pandémie. Le Théâtre a trouvé un talentueux comédien, auteur, réalisateur ; il a créé sa compagnie : Ah le Zèbre. Il est à l’affiche dans de nombreux spectacles.
C’est une pièce écrite par Emmanuel Darley, dans un « format de poche », théâtre en appartement pour une nouvelle approche artistique. Le confinement dû à la pandémie a mis un arrêt brutal à cette expérience en octobre 2020.
Michel-André Pouly
Vu en janvier 2022 à 20 h Maison de la Poésie d’Avignon.
Photo JB Loiseau