« Les promesses de l’incertitude » – Marc Oosterhoff – Au Théâtre de Vidy, Lausanne, du 18 au 23 décembre 2021
Le théâtre du mouvement de Dimitri, les arts martiaux en Chine, l’acrobatie et la danse contemporaine à la Manufacture de Lausanne, autant d’infrastructures qu’a fréquentées l’artiste Marc Oosterhoff. Il compte donc de multiples cordes à son arc. Et malgré la superstition interdisant l’utilisation de ce mot au théâtre, des cordes, il y en a plus d’une dans cette scénographie… En effet, à l’origine, on suspendait des seaux d’eau dans les cintres en cas d’incendie. Le ciel pouvait donc vous tomber sur la tête. Et c’est bien l’un des risques que prend ce moustachu dégingandé dans son costume bistre.
Au-dessus de la scène, occupée par un bureau de fonctionnaire, sont suspendus quantité de petits sacs de lest dont les liens sont fixés au sol par une sorte de métier à tisser. Le musicien Raphael Raccuia sonorise la performance en direct, accompagnant ou anticipant les actions du comédien qui, lui, demeure muet.
Quand tout s’effondre autour de nous et que la pile qui nous incombe est si élevée qu’elle nous aveugle, comment faire front? Les situations qu’affronte ce personnage ubuesque sont à l’image de nos petits et grands défis existentiels. Trouver un équilibre, se débarrasser des peaux de banane, éviter que le fardeau nous terrasse, tenter de s’élever. Et, même en tremblant, braver ses propres peurs.
D’une élégance un peu godiche, le personnage touchant composé par Marc Oosterhoff est confronté aux pierres d’achoppement de sa vie. Il s’en sort avec des acrobaties bien que l’émotion le submerge jusqu’à l’évanouissement. Il prend des risques, balance entre deux choix, danse ses échecs comme ses réussites, trompe son spleen avec des tours de magie, joue avec le danger et échafaude avec le hasard. Son incertitude déclenche un irrésistible suspens. Son air effaré rappelle celui qu’a peint Courbet et son audace est à la mesure de sa naïveté.
Un spectacle accessible à tout public puisque les plus jeunes y voient le clown, tandis que les autres y décèlent les métaphores de l’existence et les aléas de l’humanité.
Culturieuse,
à Lausanne
Photo Mat Santa Cruz