FESTIVAL D’AVIGNON : VISITE TACTILE DE « L’AMOUR VAINQUEUR »

 visite tactile 2

CRITIQUE. FESTIVAL D’AVIGNON. Visites tactiles de « l’Amour Vainqueur » d’Olivier Py, au 12 juillet 2019.

Ils arrivent par petits groupes, deux par deux, la chaleur est écrasante, il est 5h du soir seulement, ils s’assoient sur les bancs de l’allée et blaguent gentiment, ils se connaissent pour la plupart.

Ce sont des aveugles venus assister à la visite tactile de l’Amour vainqueur qui sera suivie par une représentation audio-décrite avec casque intégré.

Certains sont simplement aveugles, d’autres plus lourdement handicapés.

C’est un moment à part, où le public va pénétrer d’une manière intime au sein du théâtre, qui ferme par habitude sa porte aux intrus.

Là, le théâtre ouvre son arrière-cour, ses dessous et chaussettes. Donc un moment particulier pour tous. Accueillants comme accueillis.

Après quelques minutes d’attente devant le rideau de scène ou est reproduite la photo d’un rideau de scène, la visite commence.

D’abord une description très minutieuse des costumes, leurs matières, leurs couleurs, leurs coupes, est dispensée par le comédien Pierre Lebon,( irrésistible en fille de vaisselle, en fait la véritable héroïne de l’Amour vainqueur), suivie par le régisseur qui décrira l’espace avec beaucoup de verve et de chaleur.

Ils écoutent attentivement avec leurs drôles de yeux qui clignotent, projetés dans tous les sens ou disparaissant profondément dans leurs orbites..

Puis à l’injonction des organisateurs, ils se lèvent et s’éparpillent dans l’espace du plateau et des coulisses, pour humer, palper, toucher, les moindres détails scénographiques de l’histoire de l’Amour vainqueur. Les multiples ampoules, les tissus des costumes, le grain du rideau de scène et du faux mur du décor, les nattes de la fille de vaisselle.

Danger, Il y a un grand trou l’arrière scène dans lequel il ne faut pas tomber !

On entend le chuchotis constant des accompagnateurs, toute l’énergie est centrée sur le la description du détail, sur le travail de mémoire et de stockage auquel ils procèdent tous.

La séance se termine, de ce moment inhabituel, une émotion de dégage pour les témoins de la scène, d’avoir assisté à toute cette énergie déployée à comprendre et sentir, percevoir lorsqu’il n’est plus possible de le faire, et d’avoir participé à un acte gratuit de don, je te donne mes yeux je regarde pour toi, mes yeux sont les tiens. C’est à la fois pas grand-chose et beaucoup.

Le soir arrive à toute allure, la salle est comble, au premier rang, on les a tous regroupés.

L’audio-description est parfaite, les indications d’une voix agréable sont synchronisés avec ce qui se passe sur scène, ni trop, ni trop peu, sauf que lorsqu’on entend la musique, plus rien d’autre n’est audible. Mais la visite de l’après-midi a été vraiment utile, pour se représenter l’espace, les décors, comprendre comment les personnages évoluent dedans, se les représenter, avec les costumes, imaginer les couleurs, les textures et les têtes des acteurs.

Cela fait maintenant la troisième année que Virginie de Crozé, directrice de la communication et des relations avec le public du Festival, assistée de Helène Lopes, organise ces visites tactiles, histoire de mettre en place des évènements particuliers pour des gens hors du commun, en petit nombre, bien loin des divertissements de masse. Et de proposer à des associations locales un accès privilégié au festival.

Belle et intéressante initiative. Aujourd’hui en France plus de 140 spectacles sont audio-décrits.

Claire Denieul

Lire la CRITIQUE du spectacle ICI

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