CRITIQUE. 73e FESTIVAL D’AVIGNON. « Phèdre ! » – François Grémaud – A la collection Lambert – Sélection Suisse à Avignon – 11 – 21 juillet à 11h30.
Certains se souviennent sans doute de cette émission de télévision populaire où, lorsqu’un invité faisait un bon mot, Maître Capello disait : jeu de mot très fin ! et bien le « Phèdre », avec un point d’exclamation, c’est un peu ça… des jeux de mots très fins – ou pas ! – des associations d’idées, des paroles de chansons qui vous viennent à la suite d’un mot… le tout basé sur une des pièces les plus fameuse du répertoire classique français : Phèdre.
Romain Daroles – mi Fernandel (que sa grand-mère aimait bien) mi Bourvil (qu’il imite à la perfection) – vient nous raconter tout Phèdre de Jean Racine (et non pas j’enracine !) en une heure trente, si ça ne démarre pas en retard !
Seul en scène, dans le petit auditorium bleu Klein de la Collection Lambert, avec pour seul objet sur scène une table blanche et en main un livre qui lui sert d’accessoire dont il fait une barbe, une épaulette, une mèche… Le comédien commence à mettre les rieurs de son côté, c’est habile, en racontant l’arbre généalogique de Phèdre fait d’Hommes, de Dieux, de demi-Dieux et autres monstres qui tournent autour de toute ces familles de la mythologie… C’est déjà à hurler de rire. Mais c’est utile non seulement pour la suite mais, avec tous les moyens mnémotechniques qu’il donne, pour sa propre gouverne ; on avait un peu tout oublié…
Puis vient Phèdre et son histoire… Comme si on y était…
Romain Daroles, inventif, fait tous les personnages, par de savantes ellipses, donnant les enjeux de la pièce comme jamais. Il redit les plus beaux vers, attire notre attention sur les fondamentaux : hémistiches, césures, rimes féminines et autres liaisons… C’est drôle et triste à la fois car Romain Daroles, fait très bien la mort à répétition de Phèdre et s’en donne à cœur joie avec Œnone qu’il fait passer tout de même pour une demeurée…
Avec ce spectacle et tous les autres de la sélection concoctée par Laurence Perez, la Suisse confirme l’utilité de faire connaître ses artistes – et du coup, son humour ! – à la France et au public d’Avignon ce dont j’ai personnellement toujours été persuadé… nous avions bien des Belges ! Il ne nous manque plus que le Québec et la Francophonie serait bien représentée à Avignon.
Emmanuel Serafini
Photo © Christophe Raynaud de Lage