CRITIQUE. Les Négresses Vertes en Concert : «MLAH les 30 ans », à L’Ancienne Belgique, vendredi 22 février 2019.
30 ans après la sortie de leur mythique album « Mlah », les revoilà sur scène ! On oublie leur âge et on retrouve leur énergie communicative. Il faut dire que le groupe et leurs chansons ont gardé cet esprit ludique de fanfare. Tellement rafraîchissant par rapport aux spectacles calés, rôdés, figés. Avec eux c’est tout le contraire, les Négresses sont restées vertes et, même si leurs cheveux ne sont plus teints en vert, ils ont gardé la « punk attitude » avec quelques pointes poivre et sel…
À l’Ancienne Belgique, qui fait salle comble, avec une foule multigénérationnelle, le concert commence à l’heure dite, comme si les Négresses Vertes avaient hâte de retrouver leur public après 17 ans d’absence. Il s’ouvre à l’accordéon sur « La valse » suivi du fameux « Voilà l’été », revu et corrigé à l’heure du réchauffement climatique : « il fait chaud, trop chaud », dit Paul O avec son petit chapeau et sa chemise rouge.
On retrouve la fusion musicale de leurs débuts entre rock alternatif, influences punks et cet air de guinguette que l’on doit à l’admirable accordéoniste Mathias Canavese. C’est ce style gouailleur et festif, au confluent des influences parisiennes (polka, valse) et méditerranéennes (flamenco, raï) qui fait la force et le charisme du groupe. Aujourd’hui, ils représentent peut-être ce moment où tous les mélanges sont possibles. Car les chansons n’ont rien perdu de leur actualité, ainsi en va-t-il, de la « danse » des Négresses, qui prône du « colorant dans les éprouvettes », parce qu’il « y’en a marre que les Noirs soient noirs et les Blancs encore plus blancs ».
On admire la voix restée forte et profonde de Stéfane Mellino à la guitare et au chant, avec ce petit reste d’accent du Sud de la France (il vient du Grau du Roi, à côté de Montpellier). Il se définissait ainsi, au moment de la composition du groupe : « je suis monté à Paris et, comme je ne connaissais personne, j’ai rencontré tout le monde ». C’est là en effet à Paris que naissent les Négresses Vertes, en testant leurs premiers titres dans le métro ou sur les trottoirs de Paris. Issues des fêtes tapageuses du populaire 19ème arrondissement de Paris, les Négresses Vertes ont connu un tournant avec la disparition de leur chanteur emblématique, Helno, mort d’une overdose à l’héroïne en 1993. Il écrivait les chansons mais aujourd’hui son esprit est toujours là et chaque membre du groupe chante tour à tour et change d’instrument pour le plus grand bonheur du public.
Vendredi à Bruxelles, ils ont joué, dans un enchaînement virevoltant, toutes les chansons du disque éponyme de leur tournée anniversaire « Mlah » et le concert s’est terminé avec en dernier rappel leur « Bodega » en apothéose sur des rythmes électroniques et dans un festival de lumière rouge. Un coup de maître que de les réunir tous les sept et une belle surprise aussi d’inviter sur scène, Marka, le père d’Angèle et de Roméo Elvis, qui réussit lui aussi à électriser la scène de l’AB. Un hymne à la vie fait de joie, d’énergie et d’humanité. Ils étaient heureux d’être là et nous aussi. Ne ratez pas leur prochain concert, il n’y en aura peut-être pas encore dans 30 ans…
Colombe Warin