INTERVIEW : OLIVIER PY, « PUR PRESENT »

INTERVIEW. Entretien avec Olivier Py – « Pur présent » (La Prison, L’Argent et Le Masque) – mise en scène d’Olivier Py –  Du 16 au 19.01.2019, Théâtre National Bruxelles.

Créé lors du 72e Festival d’Avignon en juillet dernier, « Pur Présent » est joué du 16 au 19 janvier au Théâtre National de Bruxelles. Voici un extrait de l’interview que nous avions réalisée du metteur en scène et directeur du Festival lors de sa création.

Pouvez-vous nous en dire plus sur « Pur Présent » que vous présentez cette année ?

Olivier Py : C’est une pièce en trois parties, une trilogie qui m’a été inspirée par une pièce d’Eschyle. En traduisant Eschyle je me suis rendu compte que j’avais été obligé d’inventer un style qui n’était pas celui que j’employais habituellement dans mes pièces et j’ai eu envie d’écrire un spectacle à partir de ce style-là. Ce sont donc trois tragédies au sens eschyléen, mais trois tragédies contemporaines. La première se passe dans une prison, la deuxième dans une banque et la troisième dans une rue. On touche là tout le spectre social, la thématique de l’argent, du monde économique qui supplante le politique. La violence économique est très présente et on la voit dés son origine dans la banque, jusqu’à ses conséquences les plus intimes.

Tout comme pour « Eschyle, pièces de guerre » vous prenez le parti de jouer trois tragédies avec très peu de moyens et une configuration scénique assez particulière. Pourquoi ce choix qui tranche radicalement avec d’autres de vos spectacles, plus baroques et flamboyants ?

Olivier Py : J’ai besoin des deux ! Par moments du flamboyant et par moments de la pauvreté. C’est vrai que j’étais très heureux de ce qu’on avait fait avec les pièces de guerres et j’ai voulu refaire quelque chose dans cet esprit-là mais qui soit issu de ma propre écriture, dans la même mise en scène et avec le même style littéraire que j’avais utilisé pour la traduction. Et puis ces formes permettent de tourner davantage, d’aller dans des lieux qui ne sont pas forcément des théâtres. Cette mobilité renforce le rôle social du théâtre qui devient dès lors plus évident qu’avec des spectacles qui sont de grandes machines très difficiles à transporter.

L’envie de plus de légèreté ?

Olivier Py : Oui ! et j’aime aussi travailler sur des formats beaucoup moins spectaculaires et qui reposent sur le rapport entre le texte et l’acteur avec une certaine aridité. J’ai réellement besoin des deux formes.

Comme un écho à « Pur Présent » vous présentez « Antigone » au 72e Festival. Qu’apporte le travail dans le milieu pénitentiaire sur un tel texte ?

Olivier Py : Voilà trois ans que je travaille à la maison carcérale du Pontet (à Avignon ndlr) donc ce n’est pas nouveau pour moi, mais Antigone est le projet le plus réussi avec les garçons du Pontet. L’année dernière nous l’avions joué à l’intérieur de la prison mais sans public puisque même les familles ne pouvaient assister aux représentations. Il faut dire que de travailler dans une prison représente des conditions difficiles mais cette difficulté nous apprend énormément de choses parce qu’elle nous oblige à retourner à l’essentiel.

(…)

A la tête du Festival jusqu’en 2021, le poids du Festival, avec peut-être son lot de compromis, ne représente-t-il pas un frein à votre propre créativité ou à votre liberté ?

Olivier Py : Mais je ne fais aucun compromis ! Je fais des choix et je n’ai aucune sensation de compromis. Je programme ce que je veux, très librement, les pouvoirs publics me laissent totalement libre de faire le Festival que je veux. D’ailleurs j’ai l’impression que c’est clair dans la programmation…

Je parlais surtout de frein à votre créativité…

Olivier Py : On m’a déjà dit ça quand je dirigeais un Centre dramatique ou un Théâtre National, on me l’a dit aussi quand je suis arrivé au Festival. Voilà 35 ans qu’on me dit que si je prends des responsabilités dans la cité je ne serai plus un artiste, mais moi j’ai toujours pensé l’inverse. Un artiste n’est pas enfermé dans une cage de verre, bien au contraire, et ce sont plutôt des choses qui m’inspirent. Etre directeur du Festival d’Avignon c’est rencontrer beaucoup d’artistes et pour moi c’est très inspirant, cela m’aide beaucoup…(…)

Propos recueillis par Pierre Salles
en juillet 2018.

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