CRITIQUE. « ROCK TRADING / c’est la faute aux enfants » un spectacle de Marielle Pinsard – Du 23 mai au 1er juin 2018 au TARMAC -scène internationale francophone, Paris.
C’est un peu tard pour écrire une critique, vendredi sera la dernière parisienne, et en même temps, comment ne pas laisser quelques mots sur ce spectacle et sur le lieu qui l’a accueilli… Le théâtre de Marielle Pinsard propose « une forme radicale, un acte en direct, en live à vivre entre êtres humains. » Cette volonté résonne particulièrement dans l’actualité du TARMAC. Le parallèle est effrayant puisqu’alors que ce spectacle parle de nos actes humains, c’est avec une déshumanisation propre au monde de la finance, et qui en dit long sur la francophonie en France, que le Ministère de la Culture a annoncé la fermeture du Tarmac.
« Rock Trading/C’est la faute aux enfants » aborde le monde de la finance à haute fréquence de façon onirique, si, si, c’est possible ! En 2015 lorsque Marielle Pinsard et son équipe ont commencé à travailler sur le projet, leur volonté était de traiter spécifiquement du monde des traders, avec sa langue, ses rites, mais en 2017, alors qu’ils répétaient, la façon de travailler en bourse a changé de manière radicale avec l’introduction massive de machines ultra rapides et performantes. Ce qui les a amenés à déplacer le noyau de leur réflexion. « La figure du Trader – […] point central de notre travail – était désormais obsolète. » Ils ont donc choisi d’axer leur travail sur l’homme et le soulèvement des machines. « Nous avons interrogé, dans une forme positive et théâtrale, ce grand changement d’époque. La questions est alors posée : que fait l’homme que ne fait pas encore la machine ? Et bien tout simplement, il aime, il pleure, il rit, il rote, il échange, il pète. »
Le pari est réussi, personnellement, j’ai passé un excellent moment, de la finance, je ne connaissais que le « Loup de Wall Street », je sais désormais ce qu’est la finance à haute fréquence… Le théâtre de Marielle Pinsard est onirique, drôle et loufoque. Il nous sort de nos codes habituels, éclate la représentation, surcharge la scénographie, et ce chaos nous responsabilise en tant que spectateur. Hier soir, j’étais active dans la salle, j’étais invitée joyeusement à m’interroger… Je dis joyeusement, mais avant la pièce, au lieu du traditionnel « éteignez vos téléphones » nous avons été informés, à nouveau, sur la fermeture du Tarmac, ce qui a évidemment donné un goût différent à ce qui a suivi, comme je l’écrivais dans mon introduction. Le théâtre Suisse est à suivre donc, en espérant que la francophonie ait un avenir, sans lieu, en France !
Norma Soine
vu le 29 mai au Tarmac